45ème anniversaire de la réunification du Vietnam (Contribution)
Le 30 avril 2020 est le 45ème anniversaire de la libération de la partie sud et de la réunification du Viet Nam. Nous qui étions adolescents durant la guerre d’agression impérialiste états-unienne contre le Viet Nam, ce conflit nous a marqué profondément. Il nous a fourni l’occasion d’acquérir l’indispensable conscience sociale et humaine. Elle concerne, d’une part, la nature intrinsèquement psychopathe, donc criminelle de l’impérialisme états-unien, et, d’autre part, la nécessité de lui résister jusqu’à son élimination complète de la planète.
Résistance et victoire contre le colonialisme français
Cette victoire ne fut pas uniquement celle du peuple vietnamien. À travers lui, tous les peuples colonisés, dont l’Algérie, s’en inspirèrent. Ils lancèrent leurs propres résistances contre les puissances coloniales oppressives. Et cette résistance adopta, selon les circonstances, la stratégie de la guerre populaire.
Au Nord Viet Nam, le système social établi répondait aux besoins du peuple qui soutenait pleinement ses dirigeants. Par contre, dans la partie sud, dominaient la corruption, entraînant des révoltes populaires.
Résistance et victoire contre l’impérialisme U.S
Dans le sud du pays, les dirigeants de l’oligarchie impérialiste états-unienne installèrent un fantoche, Diem, comme «Président». Pour encadrer son armée, ils envoyèrent sur place des soit disant «conseillers militaires».
Bien entendu, par la suite, on découvrit que c’était là un mensonge pour justifier le début de l’agression militaire contre le Nord-Viet Nam. Elle se concrétisa par des bombardements massifs, en 1964. Ainsi, commença la deuxième guerre de résistance du peuple vietnamien, cette fois-ci contre l’armada militaire la plus puissante du monde.
Bien entendu, les stratèges militaires impérialistes crurent à une victoire rapide et facile.
Néanmoins, le peuple vietnamien continua à résister, aussi bien au nord qu’au sud Viet Nam. La guerre du peuple était, encore une fois, appliquée avec succès. Parmi ses principes notons: transformer la faiblesse (matérielle) en force morale, ou, encore, l’intelligence (du peuple) contre la barbarie (des stratèges militaires agresseurs).
D’un côté, l’agression impérialiste fut tellement destructrice qu’elle finit par soulever l’indignation des peuples des États-Unis et du reste du monde. Étudiants et citoyens condamnèrent la guerre impérialiste par des manifestations grandioses. La répression policière contre elles n’y put rien. Elle démontra seulement que dans les pays soit disant «démocratiques», le droit démocratique de contester une guerre injuste était réprimé par la violence institutionnelle.
De l’autre côté, la résistance inouïe et extraordinaire du peuple vietnamien provoqua un éveil de conscience significatif des peuples contre l’hégémonie états-unienne. Cette conscience se manifesta en guerres populaires parmi d’autres peuples opprimés de la planète, d’une part, et, d’autre part, par des mouvements sociaux contestataires du système social dominant dans les pays capitalistes dits développés, y compris les États-Unis. Dans ce dernier pays, il est vrai que le nombre de soldats retournés morts eut son impact sur la mobilisation contre la guerre.
Après la première éclatante et stratégique victoire de Dien Bien Phu contre le colonialisme français, une deuxième fois le peuple vietnamien obtint une identique victoire contre l’agression impérialiste états-unienne, en avril 1975. Enfin, la patrie vietnamienne fut réunifiée. Enfin, le peuple vietnamien commença à vivre en paix en construisant sa société sans intervention étrangère.
Télévision
La guerre au Viet Nam fut entièrement télévisée. Quotidiennement, chaque soir, les images des méfaits de l’armée états-unienne étaient vues par les télé-spectateurs du monde entier. La guerre, la vraie, l’atroce, l’insupportable, l’incroyable, était vue en direct, dans toute son horreur, avec ses crimes insupportables, les villages entièrement incendiés, les paysans tuès sur place avec leurs vaches, leurs cochons et leurs poules, vieillards, femmes et bébés. Le 16 mars 1968, le massacre des villageois de My Lai fut un atroce crime de guerre. Comment expliquer une telle barbarie allant jusqu’aux crimes contre l’humanité, identique à celle des Nazis, commise par la nation qui se prétendait « le modèle du monde » ? Les motifs ont été évoqués auparavant.
Pour revenir au rôle fondamental de la télévision dans la prise de conscience de la nature barbare de cette agression, notons que depuis lors, les armées impérialistes n’ont plus jamais laissé les photographes et cameramen libres: ils devinrent et demeurent des «embedded» (liés aux armées d’agression pour contrôler leur travail, devenu un moyen de propagande justifiant les agressions contre les peuples).
Leçons pour le monde
Celles et ceux qui ont vécu ces terribles et héroïques (le mot n’est pas trop fort) résistances du peuple vietnamien ne les ont jamais oubliées. Elles permirent l’éveil des consciences, non seulement de peuples opprimés dans les pays dits «sous-développés», et de citoyens dans les pays dits «développés», mais également de militaires états-uniens. Ces derniers finirent par comprendre qu’ils ont été manipulés jusqu’à commettre des crimes de guerre qu’ils regrettaient. Parmi ces vétérans, un nombre significatif, de retour aux États-Unis, se sont suicidés par remords.
Je citais également ce constat : « Après la Seconde Guerre mondiale, les caractéristiques dominantes des plus hauts responsables des forces armées américaines étaient devenues l’arrogance professionnelle, le manque d’imagination et de sensibilité morale et intellectuelle. C’est ce qui avait amenè des hommes, par ailleurs intelligents (…) à se conduire comme des imbéciles. » (4).
Après la réunification du Viet Nam, on constate dans le monde que les impérialistes s’obstinent à être de « mauvais élèves » qui « n’apprennent pas la leçon ». Il reste donc aux peuples opprimés à s’inspirer correctement de la leçon fournie par le peuple vietnamien. Sa résistance et sa victoire sont une épopée dans la lutte des peuples pour leur indépendance.
Kaddour Naïmi
(1) « Vietnam, La salle guerre », ARTE documentaire 2015, https://www.youtube.com/watch?v=TiwRVMExiNw
(2) Idem
(3) « La guerre pourquoi? La paix comment?… » librement disponible dans https://www.kadour-naimi.com/f_sociologie_ecrits_guerre_paix.html
(4) Neil Sheehan, ex journaliste U.S durant la guerre du Vietnam in « A Bright Shining Lie » (Un lumineux étincelant mensonge), Edition Random House Inc ., New York, 1988.